La faculté de médecine au fil des siècles
Créée en 1452 par Louis XI, supprimée en 1793, elle a tantôt vivoté, tantôt rayonné…
« Si l’existence jadis d’une université à Valence est généralement connue des Valentinois, celle d’une faculté de médecine est en revanche souvent ignorée. » Corinne Basset lui a consacré sa thèse de doctorat en médecine*.
L’université de Valence est instituée en 1452. « Nous, Louis, fils aîné du roi de France, dauphin du Viennois, comte du Valentinois (…), nous jugeons tout à fait opportun, nécessaire et convenable de créer, d’établir dans le territoire qui nous est soumis, une université dans laquelle seront enseignés le droit canon, le droit civil, la médecine et les arts libéraux. » Elle est installée rue de la Molle, près de la place des Clercs. On ignore quand débutent les cours de la faculté de médecine, mais on sait qu’au 16e siècle, son fonctionnement est chaotique, perturbé par les troubles religieux (catholiques/huguenots) et les épidémies de peste (celle de 1586 vide Valence des deux-tiers de sa population). Cependant, des étudiants viennent de loin (Allemagne, Flandres, Milan… et France entière), ce qui tend à prouver que le rayonnement de la faculté n’était alors pas négligeable.
Logés chez l’habitant
Au siècle suivant, d’autres remous l’agitent : rémunération des enseignants (jugée inéquitable par les professeurs de théologie, moins bien dotés), désignation des agrégés et attribution des régences… Quant à sa situation financière, elle n’est guère florissante. Il semblerait que ses effectifs aient été souvent faibles. On note cependant un regain de dynamisme à la fin du 18e siècle, sans doute grâce à la réputation d’Arnulphe Daumont. La Révolution sonne le glas de la faculté de médecine de Valence : le dernier étudiant part à l’automne 1791. Le 15 septembre 1793, la Convention supprime toutes les universités.
La thèse du docteur Basset est riche en enseignements sur l’organisation des études, leur contenu, les professeurs et les écoliers. Ainsi, ces derniers logeaient chez l’habitant. Ils étaient fréquemment sollicités pour payer les professeurs. Pour l’ouverture des cours, tout le corps universitaire se rendait solennellement à la cathédrale où était célébrée une messe du Saint Esprit.
A l’issue de leurs trois années –théoriques- d’études, les écoliers pouvaient enchaîner baccalauréat, licence et doctorat. Des écoliers dont on sait, grâce notamment à Rabelais, qu’ils apportaient une certaine animation dans la ville, pas toujours du goût des habitants et des professeurs. « Es université et escoles, à fin d’étudier en ycelles les belles lettres humaines, sciences et arts, ne vont guère jeunes gens de Valence, mais dans les hostelleries les trouve-t-on à grand foison… Ils vont s’esbattant, se gaudissant, et de jour et de nuit content chansons et boivent ès tavernes. »**
*Histoire de la faculté de médecine de Valence, 1452-1793, thèse soutenue en 1989 à l’université Claude Bernard.
**Histoire de Valence-Études, Rabelais à Valence en 1532. Guilleminet.
Toutes les facultés de médecine devaient créer un jardin des plantes. Valence eu l’un des premiers de France, dès 1635. Il était situé rue Jardin du roi, aujourd’hui rue Louis Gallet.
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C’est le nombre d’articles qu’Arnulphe Daumont (ou d’Aumont), l’un des plus célèbres professeurs de l’université de Valence, aurait rédigé pour l’Encyclopédie. Diderot et d’Alembert le qualifiaient du « plus habile et plus utile » de leurs collègues. Thèmes de ses articles : la « colliquation », la « danse de Saint-Guy », la déglutition…
Ce Grenoblois fut l’un des personnages les plus estimés de sa ville d’adoption, à la fois pour ses qualités humaines et professionnelles. Membre de l’Académie des sciences et des belles lettres de Lyon, il faisait partie de la Société royale académique et patriotique de Valence, qui réunissait l’élite intellectuelle de la ville. Nommé par le roi à la première chaire de médecine le 22 avril 1747, il fut le dernier professeur de la faculté à laquelle il contribua à redonner quelque éclat.
Parmi les autres professeurs renommés, citons Laurent Joubert. Né en 1529 à Valence au sein d’une famille de 20 enfants, il passe son doctorat à Montpellier avant de revenir enseigner dans sa ville natale de 1561 à 1567. En 1570, il est promu médecin du roi Henri III. Auteur de nombreux ouvrages –dont l’un sur l’orthographe…-, ce médecin-chirurgien lutta toute sa vie contre les préjugés.
Source : thèse du docteur Corinne Basset.